Une sépulture musulmane pour le canton de Vaud ?


Publié dans le 24Heures le 7.12.2012
La création d’un carré musulman dans un cimetière lausannois est en discussion entre les autorités et l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM). Le dossier a progressé ces dernières semaines, mais des doutes persistent à gauche et à droite.

Franchement, avec quel argument rationnel pourrait-on aujourd’hui encore refuser la sépulture musulmane?

Le coût? Non, car enterrer une dépouille dans un coin du cimetière ou un autre revient au même.

L’intégration? Au contraire, de nombreux musulmans bien intégrés se font rapatrier dans leur pays d’origine, parce qu’ils ne peuvent trouver ici la paix éternelle dans la dignité et le respect de leur tradition cultuelle. L’absence d’une sépulture musulmane provoque donc un échec de l’intégration dans sa phase finale.

L’égalité de traitement? Les chrétiens peuvent se faire enterrer selon leur tradition. Les cimetières dits laïques le sont uniquement dans leur mode de gestion, mais non dans la manière dont se font les tombes: des tombes comme on les connaît depuis toujours et comme il s’en trouve dans les cimetières confessionnels des églises. Traiter tout le monde de la même manière signifierait donc permettre aux musulmans aussi de se faire enterrer selon leurs rites.

On nous dit parfois que le cimetière pressenti du Bois-de-Vaux fait partie des sites protégés du patrimoine. D’accord, mais cela ne vaut-il pas pour les autres tombes aussi?

Il n’y a donc aucun argument raisonnable contre la sépulture musulmane.

Nous souhaiterions intégrer ce rite dans le système en vigueur. Or le règlement cantonal sur les inhumations exige l’enterrement à la ligne, donc une dépouille après l’autre, sans distinction. Etant donné que ces lignes pointent rarement vers La Mecque, comme le veut la tradition musulmane, et que les autorités cantonales n’entendent pas en modifier l’ordonnance, nous serons probablement obligés de nous diriger vers une solution à part, régie par une concession.

Si cette concession devait être payante, les musulmans paieraient deux fois leur enterrement: par les impôts et par la concession. Qu’adviendrait-il alors de la liberté de croyance et de l’égalité garantie par la Constitution fédérale à l’article 8, al. 2 («Nul ne doit subir de discrimination du fait (…) de ses convictions religieuses…»)?

Selon nos discussions avec les autorités, fonctionnaires et politiciens confondus, rien ne s’oppose techniquement à la mise en place d’un carré musulman. Sur certains points, elles peuvent se montrer flexibles, sur d’autres, à nous de faire preuve de souplesse. Il ne reste donc qu’un élément à développer pour que Lausanne rejoigne les nombreuses villes suisses autorisant déjà la sépulture musulmane: la volonté politique.

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