Être ou ne pas être: les Suisses et le handshake
Une contribution au débat concernant le refus de la
Municipalité de Lausanne d’accorder la nationalité Suisse à un couple
lausannois qui a refusé de serrer la main et de répondre à des élus du sexe
opposé. Voir :
Je comprends la décision de la Municipalité dans l’ambiance
actuelle. Est-elle pour autant justifiée ? Du moins, elle me semble mal argumentée.
L’absence de la poignée de main chez certains musulmans n’a
aucun lien avec l’égalité des sexes. Il s’agit en réalité d’une interprétation
exagérée du principe d’éviter tout ce qui pourrait amener à l’adultère. En
conséquence, c’est donc une question de pudeur et non d’égalité. Je pense que
la Municipalité, tout comme le grand public, a mal évalué la chose par manque
de connaissance.
Le réflexe de voir toujours le pire derrière un comportement
inexplicable de la part d’un musulman est une manifestation de l’islamophobie
ambiante, une pathologie sociétale dont on souffre tous.
Cela m’arrive aussi de me voir exposé à l’absence de la
poignée de main de la part d’une femme musulmane. Je la tends par principe et
je laisse tomber s’il n’y a pas de réaction positive. Sachant qu’en aucun cas c’est
l’expression d’un manque de respect ou d’égalité, j’accepte cette diversité dont seulement la personne concernée connait les véritables motivations, y
inclut s’il s’agit d’un élément religieux que je désapprouve. C’est le principe
même de la liberté religieuse et du respect des diversités pour moi.
Clairement, le comportement de ce couple fait preuve d’un
manque de politesse et de sensibilité. Clairement, avec cette manière de faire
ils auront plus de peine à se débrouiller en Suisse. Est-ce le rôle de la
Municipalité d’évaluer ces éléments là, voire de jouer un rôle éducatif
lors du processus de naturalisation ? Pas sûr.
La base légale pour la naturalisation dans le Canton de Vaud
est claire. Voici les conditions posées par le droit suisse[1] :
- Être titulaire d'un permis d'établissement C
- Avoir séjourné en Suisse 10 ans
- Avoir séjourné 2 ans dans le canton de Vaud dont l'année précédant la demande
- Parler et écrire en français (certificats A2 écrit/B1 oral)*
- N'avoir perçu aucune aide sociale dans les 3 ans précédant la demande*
- S'acquitter de ses impôts
- Ne pas avoir de poursuites et d'actes de défaut de biens récents
- Respecter la sécurité et l'ordre public
- Posséder des connaissances élémentaires en géographie, histoire, sociale et politique de la Suisse, du Canton et au niveau local
Pour moi, le comportement, certes maladroit, de ce couple,
ne contrevient à aucun des points ci-dessus.
L’Etat se doit d’être exemplaire et d’appliquer aveuglement le
droit à la lettre, indépendamment de considérations individuelle, culturelle,
religieuse, etc. Comment sinon pourrait-il exiger de même de la part de ses
citoyens ?
En outre, je partage le point de vue d’Ada Marra qui
consiste à argumenter en faveur d’une égalité de droit à la Suissitude entre
celles et ceux qui la demandent et celles et ceux qui l’ont déjà. A savoir, que
des comportements reflétant une diversité culturelle, religieuse ou autre, qui
ne contrevient pas à nos lois et qui sont pratiqués par des (déjà-)Suisses ne
devraient pas constituer un critère d’exclusion pour les candidats à la
nationalité Suisse.
Être ou ne pas être Suisse ne se limite pas à la poignée de main. Interpréter
des éventuelles attitudes derrière un comportement qu'on ne comprend pas relève d’un examen de
conscience peu en phase avec nos principes démocratiques.
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